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L’AMARONE, ce grand vin d’Italie

L’amarone, avec le barolo et le brunello fait partie du trio de tête des trois grands vins d’Italie.
Ces trois vins sont considérés comme étant des produits haut de gamme et demandent des prix en conséquence.

L’Amarone le moins cher à la SAQ est à 30 $. Cinq des 32 amarones de la SAQ sont de 30 à 40 $; neuf sont de 40 à 50 $; les autres sont à plus de 65 $.

La particularité de l’amarone c’est qu’il est fait de raisins séchés pendant 60 à 120 jours dans des greniers. C’est la technique de l’appassimento ou passerillage. Les baies perdent ainsi de 35 à 40 % de leur liquide. Ce qui donne des vins concentrés, légèrement sucrés (4 à 12 g/l) et au degré d’alcool élevé de 14 à 17. Le taux d’acidité de ces vins est souvent très élevé aussi, ce qui fait que dans les meilleurs on ne perçoit pas le sucre.


Les raisins sèchent de 60 à 120 jours.

Ces vins sont élevés en barriques neuves et moins neuves, petites de 225 litres à plus grosses, des tonneaux, de Slovénie, de France et des États-Unis.

La technique permettant de faire l’amarone a été développée dans les années 1950 lorsqu’on a découvert une famille de levure, la Saccharomyces bayanus, permettant de transformer presque tout le sucre en alcool. La compagnie Banfi a alors popularisé ce vin aux États-Unis. Le vigneron démarre souvent la fermentation avec les levures indigènes puis ajoute la bayanus. Cette souche est aussi utilisée pour les beaujolais nouveaux et les tokaji.

Auparavant, les raisins séchés servaient à faire le recioto, des vins très sucrés, maintenant bien rares. Jusqu’en 1991, l’amarone était d’ailleurs appelé Recioto della Valpolicella Amarone. Maintenant, on dit amarone della Valpolicella ou tout simplement amarone.


Les raisins dans le grenier de Tenuta Santa Maria Valverde

On utilise des cépages autochtones pour faire l’amarone. Ce sont surtout la corvina (minimum 45 %) et le corvinone, appelé aussi corvina grossa. La corvina pour ses saveurs et le corvinone pour son acidité. Le troisième cépage obligatoire (min 5 %) est la rondinella reconnue pour ses arômes et ses saveurs. D’autres cépages sont aussi utilisés, souvent en toute petite quantité: molinara, oseleta, forselina, turcherra, dindarella et une dizaine d’autres.

La culture se fait surtout sur des vignes qui poussent en pergolas. Des vignes hautes, les raisins se trouvent à deux mètres du sol au-dessus de la tête des vendangeurs. Ces grappes sont ainsi protégées par un bon couvert de feuilles. Elles résistent ainsi mieux au réchauffement climatique très marqué en Valolicella ces dernières années. Il y a aussi 20 % des cultures sur pieds de vigne taillés en Guyot. Cette culture en Guyot permet la mécanisation; alors que celle en pergolas n’autorise que les vendanges à la main.


La journaliste Marie Roginska sous les pergolas de Secondo Marco.

En Valpolicella, comme presque partout dans le monde, les meilleurs vins sont produits par des raisins cultivés sur les terrasses à flanc de colline; alors que les plus ordinaires sont faits dans les plaines.

Comme les deux autres grands vins, barolo et brunello, l’amarone est un vin italien peu consommé en Italie. En effet, l’amarone est exporté à 60 %. De plus, plusieurs parmi les meilleurs producteurs nous ont dit exporter de 80 à 90 % de leur production.

Le Canada est le quatrième acheteur d’amarone après les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne. Le Canada a acheté 13 % des 315 millions d’euros d’amarone exporté en 2015.


Vue de San Giorgo du domaine Boscaini Carlo

Sucre ou pas sucre
La grosse question que se posent les producteurs d’amarone ces jours-ci concerne l’avenir de ce vin demi-sec. On dit que la mode des vins sucrés est derrière nous. Les vignerons craignent de subir le sort des portos, maurys et autres banyuls, ces vins doux qui ne se vendent plus très bien.

La situation de l’amarone est toutefois  une peu différente. Ce n’est pas un vin doux, mais demi-sec. C’est-à-dire qu’il contient moins de 12 grammes de sucre et non pas de 50 et 100 grammes comme les vins doux.

La mode en Amérique du Nord est au vin rouge demi-sec. On n’a qu’à penser à tous ces vins très populaires comme le Ménage à Trois. Il y a toutefois un hic, l’amarone est bien cher, souvent plus de 40 dollars et les gens qui achètent des vins chers sont plutôt portés vers les vins de table, les vins peu sucrés et dotés d’une bonne acidité.

Les producteurs d’amarone craignent ainsi que ce marché s’essouffle et que l’amarone passe de mode. C’est un vin costaud, élevé en alcool et légèrement sucré. Les connaisseurs de vin se dirigent de plus en plus vers des vins fins et élégants.

Finalement, l’accord à table pose problème. On mange de plus en plus des mets légers et l’amarone commande des plats costauds.

Lors de la présentation du millésime 2012 des amarones à Anteprima Amarone à Vérone le 30 janvier, il a été beaucoup question du Canada. Les responsables du consortium amarone ont dit miser beaucoup sur le Canada pour accroitre ses exportations.

Classico ou pas
La région de Valpolicella est divisée en trois zones. La zone dite classico à l’ouest près du lac de garde. La région a été étendue à la valpentena au centre puis agrandie dans les plaines et plus à l’est. (Cliquez sur la carte.) En 10 ans la superficie cultivée est passée de 5700 à 7600 hectares. La zone classico est réputée pour produire les meilleurs vins. J’ai tout de même gouté de très bons vins provenant de l’est.


Autrefois, on y produisait beaucoup de reciotto. Un vin très sucré, maintenant très rare. J’en ai gouté un délicieux sur place.

La région produit aussi du valpolicella ordinaire et du ripasso.
Ces derniers sont un peu comme de petits amarones. Ce sont des vins de facture moderne pour plaire à une clientèle jeune. Le valpolicella ordinaire est considéré sur place comme un vin à pizza. Pourtant, j’en ai bu de très bons, de beaux valpolicellas classico superiore élégants et très agréables à boire.

Les gens du consortium comptent beaucoup sur le tourisme pour faire connaître l’amarone. Par contre, j’ai remarqué sur place que rares sont les bistrots et terrasses où l’on consomme de l’amarone. Même le valpo ordinaire est délaissé par les Véronais pour du spritz et de la bière. Le spritz est une boisson très à la mode en Vénétie, c’est du mousseux ou de l’eau gazéifiée avec de l’aépérol. C’est légèrement amer et désaltérant. On voit cette liqueur orange sur presque toutes les tables des terrasses, même en janvier!

L’amarone est souvent un vin de garde. J’y ai gouté de très bons 2008 et un superbe 1999. Comme vous pouvez le voir dans mes notes sur Les meilleurs amarones 2012, les styles sont très variés. Ça va du bien sec au plus sucré; de l’élégant au lourd boisé; du riche au fin…

Je parlerai bientôt de quelques bons producteurs d’amarone rencontrés dans leurs vignobles du Valpolicella fin janvier.

Accord avec les mets
L’amarone est un vin costaud, donc les accords se font avec des vins costauds. Ces vins puissants et quelquefois raffinés peuvent très bien accompagner les ragoûts, les steaks, les viandes grillées ou braisées, les pâtes en sauce, le gibier, les risottos. Certains les consomment aussi avec les fromages de type cimbro et pecorino.

Des chiffres
Le Consortium de tutelle des vins du Valpolicella regroupe 275 vignerons embouteilleurs; 2300 viticulteurs et 7 coopératives.
La superficie du Valpolicella : 7600 hectares, dont 3400 dans la zone classique.
En 2015, 60 millions de bouteilles de valpolicella, ripasso, amarone et reciotto ont été produites.
Une production moyenne de 100 000 hectolitres.
Ventes totales : 315 millions d’euros. Exportation : 60 %.

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Ce voyage de presse a été fait à l’invitation de l’association des vignerons du Valpolicella Consorzio per la Tutela dei Vini Valpolicella.

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