Aller au contenu

Clos de Tart

Le Clos de Tart est un vin qui a une certaine importance pour moi. C’est par un Clos de Tart 1978, bu à la fin des années 1980 que j’ai découvert que le cépage pinot noir pouvait être si bon.

Je me souviens d’avoir dit à l’organisateur de la dégustation à l’Amicale des Sommeliers de l’Outaouais que je n’avais jamais goûté un vin aussi bon. Je venais de réaliser qu’un pinot noir à maturité pouvait être absolument délicieux.

Le producteur de ce clos mythique était de passage à Montréal dernièrement, et nous a fait goûter dix millésimes de son vin. M. Sylvain Pitiot qui est le régisseur du domaine de 1996 est très fier de sa production et avec raison.

Le domaine fait 7,5 hectares d’un seul tenant. Il appartient à la maison Mommessin [1].

Le producteur classe ses vins en deux groupes, ceux provenant de millésimes dits classiques, 1996-1998-1999-2001-2004; et ceux de millésime plus chaud et sec et de récolte précoce, soit les 1997-2000-2002-2003-2005.

Voici donc les vins dégustés en commençant par les plus jeunes. Ce n’est pas dans cet ordre qu’ils ont été dégustés.
J’y inclus des notes provenant des observations écrites et orales de M. Pitiot.

Une observation générale : ce sont des vins très différents, autant par leur tanin que par leur fruité.

Clos de Tart 2005
C’est une année exceptionnelle en France. Autant en Bourgogne qu’en Bordeaux, les conditions climatiques ont été idéales et exceptionnelles. Il a fait chaud. Il y a eu peu de pluie, et l’ensoleillement a été de 1911 heures, soit 90 de plus que la moyenne des 30 dernières années en Côte de Nuits.

«Le matin du mercredi 21 septembre, sous un plein soleil et une température fraîche, 25 vendangeurs pénétrèrent dans le Clos afin de couper les grappes. La cueillette fut facilitée grâce à deux travaux préparatoires, l’effeuillage et la vendange verte, effectués début août par une équipe d’une vingtaine de personnes. L’effeuillage est la suppression manuelle de certaines feuilles de la vigne; ell s’applique sur la face est du rang [côté soleil levant], au niveau des grappes, pour améliorer l’aération et l’ensoleillement des raisins. Quant à la vendange verte, elle a pour but de ne conserver que les meilleures grappes, dont le nombre, au Clos de Tart, est limité à cinq afin de réduire le rendement et, ainsi, de permettre une récolte de meilleure qualité.»

Les raisins étaient tellement beaux qu’on n’a pas utilisé la table de tri. Une première depuis l’acquisition de cet outil en 1996.

M. Pitiot en a profité pour faire une expérience. Alors que d’habitude, il érafle 75 % de la récolte, une partie de la récolte n’a pas été éraflée[2]. Ces tonneaux sont conservés à part pour évaluation. Il dit que les dégustations démontrent une forte différence au niveau des arômes. Ces cuvées seront mises en bouteilles séparées et évaluées régulièrement.

C’est assez original et contraire à la tendance actuelle, où les grands producteurs éraflent la totalité de la récolte.

Cette année-là, le rendement a été de 27 hl/ha et le degré alcoolique moyen de 14°.

Le vin que nous avons dégusté provient d’échantillons de toutes les cuvées puisqu’il est encore en tonneaux. Il sera mis en bouteille en mars ou en avril
Il est d’un rouge très foncé. Une belle couleur violacée sur un nez de jeunes fruits. C’est ample, plein, agréable et riche. Vivace. Impressionnant. Il devrait se vendre autour de 250 $.

Clos de Tart 2004
L’année 2004 est qualifiée de normale en Bourgogne. L’été a été maussade. Il y a eu des orages de grêle. Septembre a été chaud et ensoleillé. La récolte a commencé le 27 septembre. Le rendement moyen fut de 31,5 hl/ha, et le degré d’alcool respectable à 13,8 °.

Le vin est d’un rouge pâle très brillant. Le fruité est délicat. Ce n’est pas très ouvert. Des arômes discrets de crème et de fumée. L’acidité est vive, le fumée revient en bouche. C’est bien fait, long sur une finale de tabac blond.

Il se vendra 214 $. Quinze caisses sont en commandes.

Clos de Tart 2003
À la dégustation, le producteur a placé ce vin un peu à part avec le 2005, en nous disant de les goûter à la fin. Il avait bien raison. Ce vin est complètement différent. On dirait même un vin du Nouveau Monde.

Il faut dire que 2003, c’est l’année de la fameuse canicule en France. Vous vous souvenez que pendant que le président Chirac se prélassait ici sur le lac Massawippi, 10 000 personnes âgées mouraient dans les hospices non climatisés de France.

La vigne aussi a souffert. La floraison est en avance de 15 jours. La récolte se fait d’habitude 100 jours après la floraison. En 2003, ce cycle végétatif a été raccourci à 75 jours.

Des prélèvements faits le 20 août laissent prévoir le pire. Le raisin n’a un potentiel d’alcool que de 11 °. La vigne a subi un stress hydrique. La maturation s’est arrêtée. Mais par bonheur, il commence à pleuvoir à la fin du mois. On a débuté la récolte le 2 septembre, au lieu du 22.

«Jamais nous n’avions disposé d’une aussi belle matière première: petites grappes en forme de pommes de pin, petites baies de couleur violet-bleu foncé, état sanitaire absolument parfait sans aucune trace de botrytis. Le rêve de tout producteur de grands crus!

À de tels raisins, il fallait une vinification adaptée et un élevage du vin sur mesure. Nous avons donc opté pour des interventions encore moins importantes que d’habitude: macération écourtée, fermentation avec des températures moins élevées, pigeages moins fréquents et temps d’élevage raccourci.»

Ce qui a donné 21 hl/ha, et un degré d’alcool très élevé de 15 °.

Le vin est d’un rouge profond très foncé, presque opaque. Le nez est très différent des autres millésimes. On sent les petits fruits acidulés. C’est massif en bouche. Une tonne de fruits. Des tanins enveloppants. C’est ample et agréable. Du vrai bonbon! . 259 $ à BC Liquor, 242 $ à la SAQ et 560 $ en magnum.

Clos de Tart 2002
Une belle année en Bourgogne. La récolte commence le 23 septembre par un temps superbe, sec et frais. Auparavant, les employés de la maison ont fait une vendange verte assez efficace.

«Au Clos de Tart, nous effectuons une vendange verte avec une équipe de 17 personnes du 29 juillet au 2 août. De très nombreux ceps présentent des raisins millerandés [toutes petites baies souvent sans pépins] que nous conservons; sur les autres ceps, nous ne laissons qu’un maximum de 5 grappes. Nous procédons également, sur l’ensemble du vignoble et au niveau des grappes, à un effeuillage sur un seul côté des rangs, face est, c’est-à-dire côté soleil levant.»

La récolte donne un rendement de 28,4 hl/ha. Les raisins atteignent 14,8 °. Le PH est d’un très bon niveau de 3,2.

Ce vin est plus gras que le 2004. Il a de beaux arômes de fruits noirs et de crème. Il a pas mal plus de matière en bouche aussi. Le boisé est plus apparent. Il faut dire que le producteur utilise 100 % de fûts neufs. Toutefois, si on se fie aux vins plus vieux, ce boisé devait se fondre et devenir plus discret. L’alcool est aussi très marqué dans ce 2002. La finale est très belle et archi longue, sur le fruit et sur le bois. À revoir dans cinq ans.

Clos de Tart 2001
Les vendanges ont été tardives cette année-là, soit le 27 septembre. «Notre choix de vendanger le plus tard possible s’est encore révélé judicieux. En effet, les conditions climatiques du mois de septembre n’ont pas été favorables à une bonne maturité des raisins. Il a donc fallu attendre patiemment que le taux de sucre soit suffisant pour obtenir des fruits capables de produire un vin digne de son rang Grand Cru de Bourgogne

Le producteur dit aussi avoir fait une vendange verte sévère. «Dans le cas d’une maturation difficile, une faible quantité de raisins par pied de vigne permet d’obtenir une maturité optimum.»

«Par ailleurs, pour assurer le meilleur état sanitaire possible de la vigne sans l’utilisation de traitements chimiques, nous avons testé, sur une partie du vignoble, un effeuillage manuel effectué en même temps que la vendange verte. Cet effeuillage consiste à enlever, à la main, sur une seule face des rangs, côté soleil levant, les feuilles situées dans la zone des grappes afin que ces dernières soient mieux ensoleillées et surtout plus aérées. Cette action a été très efficace et nous avons donc décidé de l’étendre à l’ensemble de notre vignoble pour les années futures.»

Le vin plus pâle est moyennement ouvert sur des notes de cerises et de fumée. L’attaque est vive et ronde. Le milieu de bouche est souple. La longue finale est sur le fruit. C’est bien savoureux. . 177 $

Clos de Tart 2000
La récolte s’annonçant abondante, on décida de faire une vendange verte sévère ne laissant que cinq grappes par vigne. Ce qui donna un rendement moyen de 30 hectolitres par hectares. «Nous avons rarement vinifié des raisins aussi riches en sucre. Les vinifications exigent alors beaucoup de soin et d’attention.»

Les degrés alcooliques des raisins se situaient entre 14 et 14,8 °. «Afin de préserver l’intégralité des arômes, certaines cuvées ne furent ni soutirées [3], ni collées [4]

Le vin est d’un rouge très brillant. Il dégage de beaux arômes très expansifs de fruits, de crème et de tabac fin. L’attaque est fruitée, un fruité massif, corpulent. Puis en milieu de bouche ça s’assouplit sur une acidité bien vivace. C’est soyeux et souple en fin de bouche. La finale est très longue, sur des saveurs de bonbons fruités. 211 $ pour 1,5 L à la SAQ.

Clos de Tart 1999
La vendange s’est faite le 22 septembre. Les degrés alcooliques naturels sont de 13,1 à 13,7° .

Le vin s’ouvre sur des arômes fruités, de petits fruits, comme de la cerise. Il y a beaucoup de matière en bouche. Les tanins sont encore bien présents. Le vin semble plus jeune que le 2000. C’est ample et très long. Une longueur très fruitée. Ce vin a beaucoup d’avenir.

Clos de Tart 1998
«En 1998, les techniques culturales au vignoble évoluent puisque nous sommes passés de la ‘lutte raisonnée’ utilisée depuis 1996 à la ‘culture intégrée’.

Pas d’engrais chimique: uniquement des composts. Pas d’insecticides contre les vers de la grappe Eudemis et Cochylis: utilisation de la méthode dite ‘confusion sexuelle’ [diffusion dans l’atmosphère sur tout le vignoble, par l’intermédiaire de petites capsules mises en places dès le printemps, d’une phéromone de synthèse empêchant l’accouplement des papillons, donc la ponte et l’éclosion des fameux vers].

Les degrés alcooliques potentiels naturels des raisins s’étagent de 13° à 13.8° ce qui est idéal pour faire un Clos de Tart à 13.5°.
Autour de la table de tri, les trieurs ont du travail afin d’éliminer tout raisin
imparfait. Nous avons estimé à environ 10 à 15 % la perte de volume due à
cette opération de triage.

Au décuvage, les vins paraissent assez durs, tanniques et relativement chargés en fins dépôts.»

La couleur tire sur l’orange. Des arômes de tabac. Costaud. Très tannique. Les tanins accrochent. C’est rugueux. Cette sensation rugueuse persiste très longtemps. Il y a toutefois beaucoup de fruits qui assurent une longueur impressionnante à ce vin!

Clos de Tart 1997
Un nez extraverti de fruits confits et de pruneaux secs. Une belle présence en bouche. De beaux tanins biens intégrés. Sec. Le vin me semble à maturité. Un réel plaisir.

«1997 a été une année précoce. Bien que nous tenons toujours à vendanger tardivement pour obtenir la plus grande maturité possible, les vendanges commencent le 22 septembre avec des raisins d’une exceptionnelle richesse naturelle en sucre. Du jamais vu: 14,2° de potentiel moyen alcoolique! Le soleil est généreux, les vendangeurs travaillent en tenue d’été, les raisins arrivent très chauds en cuverie.

En cuverie, ce n’est pas facile, car nous ne sommes pas habitués à travailler une vendange aussi riche et aussi chaude. Après le triage et l’éraflage, il faut commencer par beaucoup refroidir les raisins pour démarrer la phase de macération préfermentaire dans de bonnes conditions. En effet, si la maturité des raisins est exceptionnelle, leur acidité est plus faible que d’habitude ce qui rend le moût plus fragile.»

Clos de Tart 1996
Il a développé une teinte brune. L’attaque est massive, le vin est costaud et soyeux à la fois. Les tanins sont très agréables, expressifs et ronds. C’est très plaisant et d’une longueur surprenante. Ce vin procure un immense plaisir. Il a très bien accompagné la délicieuse pièce d’agneaux bien préparée par le chef du restaurant La Chronique de la rue Laurier à Montréal.

«En 1996, alors que les autres Domaines avaient fini de vendanger, au CLOS
DE TART, nous commencions la vendange le dernier jour du mois de septembre pour terminer le 4 octobre.

Nous inaugurons un nouveau matériel de traitement des raisins avant leur mise en cuve. Il s’agit d’une longue table de tri avec tapis roulant, d’un érafloir doux sans fouloir et d’un tapis élévateur.

Autour de la table de tri prennent placent des vendangeurs expérimentés qui éliminent chaque raisin insuffisamment mûr ou atteint de pourriture, chaque feuille ou chaque morceau de sarment. Les grappes ainsi triées tombent dans l’érafloir qui, en tournant très lentement, enlève la rafle en douceur. Enfin, les baies de raisins, intactes, se déversent sur un tapis roulant qui les achemine, sans pompage, dans les cuves de vinification.»

Voilà qui fut bien intéressant et qui nous permet d’en apprendre un peu plus sur les procédés de fabrication de ce fameux nectar.

La plupart de ces vins sont encore très jeunes et vont s’améliorer et être encore bien meilleurs après quelques belles années de cave. Il nous faut donc être patients.

Le domaine Mommessin est représenté au Québec par la maison Charton Hobbs.

1. Mommessin n’a conservé que le Clos de Tart et a vendu sa marque de négoce à la firme Boissset.

2. Érafler: enlever la rafle, la partie ligneuse [bois] de la grappe pour ne conserver que les raisins.

3. Soutirer: transvaser du vin ou quelque autre boisson d’un récipient dans un autre afin d’en éliminer les lies, sédiments ou dépôts et de manière que ces derniers restent dans le premier récipient.

4. Coller: débarrasser le vin des particules en suspension. Cette opération peut être effectuée avec du blanc d’œuf, de la gélatine ou de la bentonite [argile].

5
Code SAQ : 10338021
Couleur : Rouge
Région : Bourgogne