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Une productrice en colère contre la SAQ

Il y a quelques jours lors d’une dégustation à l’Académie du vin de l’Outaouais, je goûte deux millésimes d’un très bon vin du Domaine du Closel : le Clos du Papillon 1999 et la Cuvée spéciale 1992. Deux très beaux savennières bien conservés par un membre de l’Académie.

Nous avions déjà dégusté à quelques reprises le 1999 toujours excellents.

C’est un vignoble de la Loire qui existe depuis plus de 450 ans, dont 200 dans la même famille et qui a très bonne réputation.  

Ne retrouvant plus de vin de cette maison sur les tablettes de la SAQ, je m’informe auprès du Domaine du Closel afin de connaître le pourquoi de cette absence au Québec.

«Des histoires épouvantables»

La productrice Mme Évelyne de Pontbriand me répond :

Evelyn de Pontbriand«La SAQ m’a fait des histoires épouvantables parce que notre dernière livraison du Clos du Papillon 2001 (qui a eu un succès fou ailleurs dans le monde!) avait quelques dépôts de tartre. Ce qui n’a dérangé personne ailleurs…
 
Bref, ils ne m’ont non seulement pas payé, mais l’ont soi-disant détruit alors que j’avais trouvé un client qui en prenait la totalité. Il aurait fallu que je leur rachète (!) pour le vendre à ce client. Ce vin non payé était de mon point de vue, toujours ma propriété, hormis le coût du transport.

Bref, je refuse d’en payer la destruction et ils ne veulent plus me commander.»

Des flocons de tartre

À la SAQ, on me dit que le 7 octobre 2005 on a constaté que le vin de 50 caisses du Clos du Papillon 2001 contenait «des flocons de tartre en quantités très importantes.» Ils l’ont alors jugé impropre à la vente et ont proposé à la productrice de reprendre son produit en payant le transport de retour (environ 1500 $) ou la destruction du produit (environ 800 $).

La SAQ dit n’avoir jamais reçu de réponse de la maison de production malgré de multiples tentatives de contact. Un avis final est envoyé le 3 mai 2006, disant que le produit sera détruit s’il n’y a pas de réponse dans les sept jours. Toujours sans réponse, selon la SAQ, les caisses sont finalement détruites beaucoup plus tard, le 27 avril 2007.

Un autre client le veut

Mis au courant de la version de la SAQ, voici ce que la productrice rétorque :
«Effectivement je vous ai dit qu’il avait du tartre, comme souvent les vins naturels, en particulier s’ils sont mal entreposés ou transportés en plein mois d’août comme cela avait été fait.

Curieusement ce problème les a dérangés le jour ou la facture était échue, c’est-à-dire au moins quatre mois après la livraison!

Oui, ils m’ont contacté de nombreuses fois, même par téléphone, j’ai répondu comme je vous le disais que j’avais un client qui pouvait le prendre. Ils ont refusé cette solution, me proposant alors de racheter le vin alors qu’ils ne l’avaient pas payé!!!!

Il me semble que ce n’est pas très honnête de leur part.

Partout ailleurs dans le monde ce vin s’est vendu sans problèmes, a eu des médailles et beaucoup de succès. J’en ai gardé quelques bouteilles, pour les journalistes, il est délicieux, mais il a un peu de tartre ce qui ne change rien au goût. Voilà la réalité.»

En fait, peut-être dirions-nous deux réalités, deux versions… quoi penser de tout cela?

Du tartre dans le vin blanc, c’est connu, ce n’est pas mauvais, sinon inesthétique. Mais s’il y en a beaucoup trop, c’est autre chose.

Du vin au musée

Un arrivage précédent du même millésime avait reçu bonne presse «Ce coup de coeur étonne par ses rondeurs, son gras et son amplitude rarement présents dans un aussi jeune savennières.» François Chartier, La Presse, 27 décembre 2003. Sur le forum Fouduvin «beaucoup de matière… une valeur sûre de l’appellation.»

Pourquoi cette incompréhension entre les deux parties? Pourquoi ne pas avoir fait suivre le vin à l’autre acheteur?

D’ailleurs, qui était cet autre acheteur? Un musée de Québec. La SAQ dit que si le vin est jugé défectueux, il n’est tout simplement pas question de permettre sa distribution au Québec.

Le Montrachet de la Loire

P.-S. Il n’y a jamais eu d’autres vins de cette maison au Québec depuis 2003.
Le Domaine du Closel, une petite propriétée de 16 hectares, n’a pourtant pas mauvaise réputation comme on le voit dans le dossier de presse de la maison.
En effet, son Clos du Papillon a été qualifié de «Montrachet de la Loire» par Robert Parker dans son Guide des vins de France. De son côté, Le Guide Hachette 2001 écrit que «le Domaine du Closel est l’un des vignobles les plus caractéristiques de l’Appellation.»

  (Quelques années plus tard…)