Le vin nature n’a pas d’existence légale.
C’est ce que l’on pourrait appeler du «n’importe quoi»; ou une catégorie fourretout ou un genre libre.
Ce qui ne rend pas la tâche facile au consommateur qui veut s’abreuver en vin fait naturellement. À qui se fier ?
Les vins bios ainsi que les vins en biodynamie sont des catégories contrôlées et certifiées par des organismes de vérification. Le consommateur peut, en général, avoir confiance et s’y fier.
Par contre, pour ce qui est du vin dit «nature» ou «naturel», c’est une tout autre affaire.
Il faudrait se fier à la bonne foi du fabricant et du vendeur; ce que fait d’ailleurs la Société des Alcools du Québec (SAQ).
Au Québec, la situation du vin nature est aussi confuse qu’ailleurs. C’est même pire.
C’est d’ailleurs ce que tente de démontrer un avocat, amateur de vin nature, qui vient de publier un essai sur le sujet dans le cadre de sa maitrise en droit transnational à l’Université de Sherbrooke.
C’est intitulé «Vin nature et traditions : Une contre-culture créatrice de normes transnationales».
M. Français Pariseau y étudie les cadres juridiques des vins; les certifications, les pratiques; les règlementations sur les vins dans les États. M. Pariseau est avocat recherchiste à la Cour d’appel du Québec.
Il est très sévère envers le système des appellations contrôlées (AOC) qui permet l’utilisation de pesticides. Citant Douzelet et Séralini qui signalent que des vins, même par moments de grands vins, sont faits avec une quantité impressionnante de pesticides et ils ont droit à la mention d’AOC prestigieuses.
«Il y a lieu de remettre en question le modèle des AOC qui attribue une qualité au vin purement en raison de sa région d’origine et de redéfinir notre notion de qualité pour qu’elle s’arrime davantage avec les principes de développement durable.»
Contrairement aux autres produits de consommation, l’information sur les vins est très cachotière. On n’en connait pas les ingrédients.
«Alors qu’on n’accepterait pas de s’acheter une canne de thon sans savoir le taux de sodium à l’intérieur, la majorité des gens achètent leur vin sans se soucier des diverses interventions et produits chimiques qui ont contribué à son arrivée sur les tablettes.»
Ce qui fait qu’on doit faire aveuglement confiance aux fabricants de vin; à leurs vendeurs et aux nombreux influenceurs.
«Or, le lien informationnel entre les producteurs et les consommateurs manque de rigueur et cela met en danger la confiance du public envers les producteurs.»
L’auteur critique la SAQ qui a un lien particulier avec les gros fabricants de vin au détriment des petits vignerons.
«Le modèle monopolistique de la SAQ a tendance à avantager les gros producteurs. Cela entre directement en contradiction avec les petites productions de vignobles qui produisent les vins naturels ou biologiques. Afin d’importer des vins de ces petits producteurs, la SAQ oblige les particuliers à acheter des caisses complètes auprès des agences de vins d’importation privée. (Sic)»
Le vin de qualité n’est pas nécessairement un vin d’AOC, ou d’AOP ou d’IGT ou d’IGP… L’auteur propose que l’on redéfinisse ce qu’est un vin de qualité.
«Au Québec, le vin nature manque d’accessibilité et cela doit s’améliorer. Le modèle de la SAQ, sans amélioration immédiate, ne répond pas aux préoccupations des agences qui lui fournissent une part de marché dans le vin nature. Ce texte a également tenté de voir qu’elles étaient les problèmes qui minent ce lien de confiance entre les producteurs et les consommateurs de vin. La solution au fatras des labels et des AOC doit passer par une déconstruction de notre rapport au vin et une redéfinition de ce qu’on entend par un vin de qualité.»
C’est 75 pages d’informations précises sur le monde du vin. Les parties historiques du document sont particulièrement intéressantes.
Le document est accessible en ligne :
Vin nature et traditions : une contre-culture créatrice de normes transnationales, François Pariseau, Université de Sherbrooke, 2022 (PDF, 75 pages )