J’ai participé dernièrement à une dégustation de dix vins de Bordeaux des millésimes 2010 à l’Académie du vin de l’Outauais.
Des vins de 40 à 145 $. Et je dois dire que j’ai été fortement déçu. Seul trois de ces dix vins méritent la note de très bon (trois étoiles ou 90/100).
La plupart de ces vins sont rustiques avec des tanins verts et asséchants. Leur acidité est élevée ce qui accentue leur astringence. Ils manquent de complexité. Les saveurs boisées sont très fortes et certains ont des saveurs végétales. Le pire à ce chapitre été le Sociando-Mallet.
Voici les vins et de courts commentaires.
Clos de La Gaffelière, St-Émilion, grand cru classé
Crème, vanille, tanins durs, costaud. 40$ *
Angludet, Margaux, cru bourgeois exceptionnel
La première bouteille était bouchonnée.
La deuxième: boisé, cèdre, tanins durs, texture pâteuse, bon boisé en finale. 50 $ *
Sociando-Malet, Haut-Médoc
Végétal et très boisé. 60 $
d’Armailhac Pauillac, 5e cru classé
Discret, melon! Facile, coulant. 80 $ *
Talbot, St-Julien, 4e cru classé
Tanins sévères, finale boisée, forte saveur de café. 95 $ *
Plusieurs participants l’ont pourtant bien aimé.
Latour à Pomerol, Pomerol
Beau fruité sur de beaux tanins, équilibré, finale cassonade. 100 $ ***
La Dominique St-Émilion, grand cru classé
Cèdre, costaud, bien riche, belle finale. Bien fait. 115 $ ***
Domaine de Chevalier, Pessac-Léognan, grand cru classé
Cèdre, juteux, beaux tanins, texture lisse, finale boisée. 115 $ **
Branaire-Ducru, St-Julien, 4e cru classé
Costaud, plein, beau granulé, longue finale très boisée. 115 $ **
Malescot Saint-Exupéry, Margaux, 3e cru classé
Opaque, belle texture, de beaux tanins, sèveux. Le meilleur. 145 $ ***
À ces prix, on devrait obtenir plus de plaisir.
Sont-ils dans une phase ingrate? Mon voisin de table me dit qu’il faut être patient, qu’ils seront bons un jour. Il faut avoir la foi! Je ne suis pas certain que des vins aux tanins si secs soient bons un jour. Je suis donc allé voir ce qu’en pensait la presse spécialisée.
Un grand bluff!
Le millésime 2010 suit un superbe 2009, et il n’est pas de la même eau.
Comme le disait si bien le magazine Le Figaro Vin en 2011: bordeaux 2010 a été un grand bluff. «Beaucoup de ces vins font grimacer avec leurs terribles tanins, d’autant que bien des crus étaient marqués par la grande maturité des raisins, mais aussi par d’étranges verdeurs.»
Et «certains propriétaires ont aussi été abusés par les hauts niveaux de sucre et ont vendangé avant maturité physiologique, ce qui explique les tanins verts.»
Où est le plaisir?
De son côté dans le magazine Le Point, Jacques Dupont, énumère les conditions climatiques très défavorables en 2010 et dit qu’on a fait «des vins qui ont oublié que leur destin était d’être bus et de donner du plaisir.»
Le choix de la date des vendanges a été très difficiles pour les producteurs. écrit M. Dupont. «Choisir à quelles dates vendanger relevait du supplice. Devait-on cueillir tôt, avant que les sucres, et plus tard les alcools, grimpent au ciel, mais risquer de se retrouver avec des tanins astringents qui grattent au palais et sèchent les papilles? Ou devait-on attendre et perdre les arômes, le bon fruité, et offrir au consommateur un vin d’apéritif plus proche du porto que du bordeaux?»
Voulez-vous me dire pourquoi de nombreux vignerons de par le monde ont appris à faire du vin qui est déjà bon et pas trop cher; pendant que ces Bordelais veulent nous vendre des vins qui sont très chers et qui seront un jour peut-être bon?
«Si un vin est mauvais jeune, il ne va pas devenir bon avec l’âge», dit Rémy Poussart.
Toute de même, nous les goûterons peut-être de nouveau dans quelques années. On ne sait jamais!
___
Ces vins sont classés 3e, 4e et 5e cru en fonction des prix qu’ils affichaient en 1855. Selon, Le Grand classement des vins de Bordeaux (2008), aucun de ces châteaux ne se classe aujourd’hui parmi les 50 meilleurs de Bordeaux.