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Une chicane entre un vigneron et un critique

Un vigneron ne veut plus que son vin soit mentionné dans un guide.
Des critiques de vin qui disent au vigneron comment faire son vin.

Si vous trouvez que la lecture des magazines de vin est devenue très ennuyante — la plupart sont du genre people et glamour, style Sissi impératrice ou Princesse de Monaco; les articles doucoureux y ressemblent à des publireportages — la lecture des blogues, sites internet et forums sur le web nous en apprennent beaucoup plus sur le monde du vin et là sans complaisance.

Telle cette controverse entre un réputé producteur de France et un critique local du vin.

Un vigneron, Hervé Bizeul du Clos des Fées, demande à la Revue du vin de France de ne pas mentionner ses vins dans leur guide.

Voici un extrait de ce qu’il écrit sur le forum qui porte bien son nom La Passion du vin.

«Je suis en profond désaccord à tire personnel et professionnel sur certaines pratiques qui ne me semblent plus conformes à mon éthique, en particulier celle de confier à certains « journalistes » pluri-actifs, plus ou moins débutants (et peu amoureux de notre région), le Roussillon. Je suis en désaccord avec leur façon de travailler, la confusion entre leur goût personnel et la notion de « bon », les privilèges (dont on me propose de bénéficier, ce à quoi je me refuse), de certains vignerons face à l’épreuve obligée à mon sens de la dégustation aveugle, la façon de travailler (en particulier le peu de présence sur le terrain, bottes au pied), les a-priori dont les Roussillon traditionnels, ce que j’appelle « Roussillon Canal Historique », sont victimes, c’est-à-dire des vins mûrs, riches, élégants et frais, qui ne cherchent à ressembler à aucun vin du Nord…»  (Merci de m’informer que le Domaine du Clos des Fées ne figure plus dans le guide)

Cependant, ce qui est encore plus intéressant, c’est ce qu’écrit la conjointe du producteur sur ce forum ainsi que sur le blogue de la Revue du vin de France. Claudine Bizeul dit que deux critiques de la Revue du vin de France sont venus dire au producteur comment faire du vin.

«Nos vins n’étaient plus ceux qu’il fallait faire désormais; que le « marché » allait bientôt se détourner de nos vins, les rejeter, que les clients n’aimaient plus ce style « lourd, traditionnel des vins du Sud » et que nous n’allions plus vendre. Il nous fallait changer de façon de travailler pour avoir des vins correspondant à la demande.» (http://lapassionduvin.com/phorum/read.php?29,586858,694563#msg-694563)

Il faut lire aussi la réponse d’Antoine Gerbelle de la Revue du vin de France dans un article intitulé Peut-on juger en toute sérénité les vins du Roussillon?
«Là, second choc : Hervé Bizeul, qui a été lui-même critique de vin pendant près de dix ans, assistant de Jean-Pierre Coffe, ne supporte plus les jugements de la presse, ceux-là mêmes qui lui ont permis d’être connu du grand public.» Monsieur Gerbelle explique aussi comment se font les dégustations pour le Guide vert.

Puis Hervé Bizeul réplique sur le forum LPV «Ainsi donc, vous ne dégustez aucune propriété à l’aveugle. Merci de me le préciser. C’est exactement ce que je pense être la première raison des « dysfonctionnements » qui me sont insupportables et que j’ai pris la peine de t’expliquer (…) Avec tous ces dysfonctionnements, vous semblez si certain de défendre « l’intérêt des consommateurs » ? N’est t’il pas salutaire, de temps en temps, de se remettre un peu en question, comme vous le demandez si souvent aux vignerons que vous jugez?» (http://lapassionduvin.com/phorum/read.php?29,586858,694741#msg-694741)

D’autres blogueurs s’en mêlent, ainsi François Mauss écrit dans le Blog du Grand Jury «Dans un maelström picrocholinesque, la RVF qui se prend pour le deus ex machina de la critique « vins », vient donner urbi et orbi sa vision définitive du vin, de sa dégustation, de son futur, côté style.»

Il ajoute «On assiste à la fois à la confirmation de copinages notoires (…), au système de re-dégustation de quelques grosses pointures qui auraient manqué le coche des étoiles, bref, on nous dit avec une franchise de maternelle que tout cela, c’est d’abord de la discussion autour de noms et non autour des contenus des verres.»

Plus près de nous, Claude Vaillancourt, note dans Le vin aux Antipodes que «les producteurs axés sur la qualité, mais venant de régions moins renommées, et n’adhérant pas aux modes du moment, que ce soit le style prôné par les revues américaines, ou bien celui des cercles branchés français, font face à un dilemme.»

C’est à lire ainsi que les commentaires (oublier les anonymes) sur le forum LPV et sur le blogue de la RVF.

  Si vous préférez les articles plus séducteurs sur le vin, genre la productrice sur le divan, choisissez le magazine Terre de Vins c’est un des plus mielleux, des plus aseptisés.