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Savoir goûter le vin : Par le meilleur sommelier du monde

Le meilleur sommelier du monde c’est Enrico Bernardo. Vous ne connaissez pas? Ça n’a pas d’importance, vous allez le connaître un peu. Il s’agit d’un jeune bollé qui se destinait à la cuisine et qui a bifurqué vers la sommellerie.

Il vient de pondre un livre, somme toute assez captivant. Chacun y trouvera, bien sûr, ce qui l’intéresse.

Ce qu’il m’a plu c’est le petit côté iconoclaste et aussi la partie analytique de la dégustation. Car, il faut dire qu’il l’a dissèque la dégustation : juste pour la bouche, il analyse 14 critères. Alors à vos papilles.

Un résumé
Comment vous résumer ce livre? Comment vous donnez une idée de ce qu’il est?

La meilleure méthode, à mon avis, c’est de vous en montrer de petits extraits de petits bouts qui vous permettront de juger.

Bien sûr, la sélection va être subjective. Comment faire autrement? Mais vous voilà averti.

Préface de
On commence par la préface, un dénommé Robert Joseph, pas connu au Québec, directeur du Wine Chalenge et du Wine International Magazine qui nous dit que « seuls les ignorants ou les sectaires les plus butés oseraient prétendre que, sous l’étiquette d’un Margaux ou d’un Meurseault, une bouteille contiendrait un vin plus fin que si elle provenait du Minervois, de Mendocino…»

Bon, si vous vous sentez visé, passez votre chemin. Mais je sais que vous n’êtes pas sectaire, puisque vous lisez un peu Vin Québec.

Mise en garde
Continuons, à la page 44, l’auteur lui-même nous fait une « petite mise en garde : un champagne ne doit pas être servi glacé. Vin ‘tranquille’ à son origine… le servir frappé augmente son acidité… ajoutons que le gaz carbonique… est déjà rafraîchissant. Pour les cuvées les plus prestigieuses, déjà vieilles, … je conseille une décantation. »

Voilà, nous sommes lancés. Décanter le champagne! Décidément, il me plaît ce jeune homme!

Les tares de naissance
Passons tout le chapitre sur la technique de dégustation, qu’il faudrait relire et surtout pratiquer, et allons directement aux entrevues que le futur grand homme a réalisé avec de grands hommes. En page 113, citons le chef de cave de Pétrus, Jean-Claude Berrouet : « Les vins de Bordeaux vieillissent, car ils sont tanniques, mais ce ne sont pas toujours les plus riches en tanins qui évoluent le mieux. C’est souvent le contraire : un vin qui naît harmonieux, équilibré et fin, il le reste toute sa vie. Comme nous, les hommes ! Les tares de naissance, nous les conservons durant notre existence. »

N’est-ce pas bien dit? Et ceci clos le bec de ceux qui nous affirment devant un vin dur, astringent et désagréable : « il est jeûne, il deviendra bon. »

Je vous avais averti, je ne suis pas objectif ici.

Maintenant, passons au bois. « Le passage en fût de bois n’est pas indispensable à la bonne qualité d’un vin…cette étape dans la vinification devrait se limiter à une légère ‘touche de maquillage’… »

Bon, si ont peut réussir à écarter les vins astringents et les trop boisés, on va finir par boire plus souvent du bon vin!

Et si on décantait
Notre meilleur sommelier du monde décante souvent et beaucoup. La plupart des vins qu’il mentionne, il les décante deux heures, certains même six heures, comme ce Véga Sicilia Unico 1970. Et même plus : deux jours pour ce Porto Quinta do Noval Vintage 1963; et encore, trois mois de décantation pour ce Madeira Malvasia Barbeito 1834.

Quel est ce vin?

« Sa robe est étonnante, car elle possède la richesse de la couleur or, et en même temps des reflets verts qui indiquent la fraîcheur et la jeunesse. Le bouquet, intense, évoque l’exotisme des fruits frais et sucrés comme la papaye, le litchi, l’ananas, la mangue. Je perçois encore des notes de compote de pommes, de gelée de pêche et de gingembre. La bouche est très sucrée, mais magnifique. Équilibrée par une forte présence d’acidité, elle affirme un profil salin et persistant. La fin de bouche est marquée par la fraîcheur et des notes de safran. C’est un vin à parfaite maturité qui procure beaucoup de plaisir.
Accompagnement : Je sers ce millésime à 14 C avec une salade de mangue parfumée à la menthe fraîche. »

Ça met l’eau à la bouche. J’espère que vous avez un bon verre devant vous.
Moi, je termine un jeune Pesquera.

Insolites
Une devinette :

« Les vignobles [ici nom d’un pays] sont parmi les plus anciens de l’histoire viticole […] premiers plans en 718, pour des raisons médicales. Aujourd’hui, malgré des conditions climatiques hostiles, humidité et vents glacials… l’homme parvient à faire fructifier ses 30 000 hectares. »

C’est le double de la Nouvelle-Zélande. Quel est ce pays dont vous n’avez jamais bu de vin?

Un zin pour l’égo
Puis Enrico Bernardo nous parle du service des vins en fonction de la personnalité de l’invité. Pour un égocentrique, un zinfandel; pour un timide, un rioja…

La température de service. Un beau tableau qui nous dit, entre autres, que seuls les vins vieux se servent à plus de 16 C.

Je ne vous le dirai jamais assez : vous servez vos vins trop chauds. Excusez-la.

La flutte pour les simples
Enfin, là où il me plaît le plus, c’est lorsqu’il recommande de décanter les vieux champagnes, comme ce Don Pérignon rosé 1978; et de les servir dans des verres tulipes « car les arômes se concentrent légèrement à la surface. Les champagnes plus  »simples » préfèrent une flûte plus étroite…»

Et voilà! J’espère que cela vous a donné le goût de ce livre.
Il y a beaucoup d’autres choses, vous avez bien compris que j’ai choisi les extraits qui me plaisaient.

Faites-le acheter par votre bibliothèque, comme je l’ai fait, et il pourra être lu par plusieurs.

Flutte! Un autre verre!

Savoir goûter le vin – Par le meilleur sommelier du monde, Enrico Bernardo, Plon, 2005, 205 p. ISBN 2-259-202540

Enrico Bernardo est interrogé sur la Web radio graperadio-europe.com [17 min.]