Nous étions quelques chroniqueurs vin belges, français, britanniques et québécois se dirigeant vers une grande table pour le repas du midi. Une pause, lors d’une dégustation de vins au Selezionne dei vini di Toscane, certains très bons, d’une belle acidité, d’autres attendris, adoucis par l’ajout de merlot au pur sangiovese.
Je causais avec un agent du Québec qui sort d’une immense salle où une centaine de vignerons, assis chacun à un petit bureau, attend les acheteurs. (Vidéo) L’image me rappelle des films noir et blanc où des centaines de bureaucrates gribouillent, ou bien des couturières à l’oeuvre, ou des rouleurs de cigare de La Havane, ou tout simplement le film «Laura» d’Otto Preminger.
L’agent est chargé de dénicher un bon vin pour la maison Benedictus. Une dame passe, tout en sourire s’exclame «Ah! l’accent québécois!» Québécoise, elle-même, nous engageons la conversation. La tribut se regroupe. Que faisait-elle là? Une agente? Non, une productrice, une vigneronne, une oenologue.
Je savais que des descendants et descendantes de Normands, Picards, Britanniques, Abénaquis et autres Micmacs se répandent dans le monde. Mais une Québécoise vigneronne en Toscane, je n’en connaissais pas!
Elle se nomme Paula Cook, de Saint-Bruno de Montarville, au sud de Montréal. Je l’invite à notre table franco-anglo-belge… Il y a déjà du vin sur notre table. Du vin d’une grande maison — Je n’ais pas écrit du grand vin d’une grande maison — mais tout simplement du vin d’une grande maison. Je l’invite donc à aller chercher de son vin. Après une certaine gène, elle se risque et rapporte presque en cachette deux bouteilles.
Le Miccine Chianti classico et Le Miccine Chianti classico riserva. Et c’est bon, très bon même, surtout le Riserva.
Qu’elle est son parcours?
Ces grands-parents paternels, les Papini, étaient de Toscane. «Je suis venu en Italie pour la première fois en 2000. J’y ai trouvé ma place et mes racines. La culture, la cuisine, les gens chaleureux, la langue musicale, les paysages magnifiques sont restés dans mon cœur.» Les gens de l’endroit l’ont tout de suite adoptée, me dit-elle. Elle s’est sentie chez elle. «J’ai commencé à apprendre l’italien.»
«Je suis resté au Québec pour finir mon baccalauréat en agriculture à l’université McGill à Sainte-Anne-de-Bellevue (2003-2006) et tous les ans durant l’été je retournais en Toscane pour suivre des cours d’italien à Florence.
En 2006, sur un bulletin j’ai retrouvé une description d’une maîtrise idéale pour satisfaire ma passion pour l’agriculture, les voyages et surtout les langues. C’était le Master VINTAGE (www.vintagemaster.com). Un cursus sur la viticulture, l’œnologie et le terroir qui se déroulait dans trois universités, à Angers en France; à Piacenza en Italie et à Valencia en Espagne). Je découvre alors que l’étude du vin regroupe toutes mes passions: l’agriculture, la science, les langues, les cultures et même l’art.»
Elle déménage donc en Europe en 2006 pour poursuivre ses études, puis s’installe en Italie en 2008 sur le domaine de ses grands-parents, Le Miccine, situé au sud de Radda in Chianti. Un domaine de 13 hectares, 7 de vignes; le reste en jardins, oliveraies et forêts comme c’est souvent le cas dans les domaines viticoles de Toscane.
Que fait-elle au Miccine? «Mon rôle couvre un peu de tout: gestion vigne et vin; oenologue, ventes; site web; relations publiques; agrotourisme, représentante, etc. Le soir venue, je dors très bien. C’est un travail très satisfaisant!»
En plus des deux chiantis, Le Micine produit un Rosso toscano merlot et un Bianco toscano vermentino. En tout 30 000 bouteilles. «Nous espérons monter à 42 000 en 2013.»
«Nos ventes se font principalement en Italie et aux États-Unis. En ce moment nous sommes en train de développer des contacts au Canada, en Allemagne et en Grande-Bretagne.»
Paula m’écrit il y a quelques jours qu’elle a déniché un agent pour l’Ontario Tre Amici Imports (www.treamiciwines.com) «On cherche encore un agent au Québec pour nous aider à rentrer à la SAQ.»
Pourquoi le vin de la Québécoise vigneronne de Toscane n’est pas encore à la SAQ? Personne chez nous ne l’avait encore découverte? Est-ce que nous nous fions trop aux goûts des autres pour choisir les vins à importer, aux goûts des Wine Spectator, des Parker des USA, des Gamberro Rosso et autres. Les producteurs d’origine américaine sont bien représentés sur le marché étatsunien.
Au plaisir de boire du chianti Le Miccine bientôt au Québec.
Bonne continuation à Paula Cook.
Le site du domaine Le Miccine www.lemiccine.com