Scandale en Allemagne et en Argentine!
On a retrouvé un fongicide antibiotique dans des vins d’Argentine de marque Fuzion et Santa Julia, entre autres.
Cette substance interdite dans le vin se nomme natamycine. C’est un produit utilisé pour tuer les champignons, les levures. On en a retrouvé dans plusieurs vins argentins lors d’un contrôle en Allemagne en octobre et novembre dernier. En fait, 50 % des vins argentins contrôlés à cette occasion contenaient cette substance illicite.
Plus de 120 000 bouteilles de vin argentin de huit marques ont été retirées du marché. FuZion 2008 Mendoza Tempranillo-Malbec, lot L09-198-21; Santa Julia 2008, Mendoza, Cabernet Sauvignon, L09-184-09; Villa Paola 2008, San Rafael, Mendoza 2008, 01/2009 et de la même bodega Villa Atuel 2008 San Rafael, Mendoza Syrah Merlot, WT1377j; Marañón 2009 Malbec, Mendoza, Lot 9289-0D72; Cruz del Indio 2007 Malbec lieblich, Anelo Neuquen Patagonia, L-9168; Cruz del Indio 2007 Malbec sec, Anelo Neuquen Patagonia, L-9139; et Santa Andrea 2008, Mendoza, Malbec-Cabernet Sauvignon, L-56659. (Rheinland Pfalz)
Fuzion et Santa-Julia de la maison Zuccardi, sont des marques très connues au Québec. Le vin le plus vendu à la SAQ est le Fuzion Shiraz-Malbec.
On en a aussi trouvé dans deux vins d’Afrique du Sud : W.O. Constantia 2009 Shiraz Rosé; et Constantia 2009 Blanc de Noir.
Natamycine
Le natamycine est un agent conservateur, dont le nom de code est E235, autorisé comme additif dans certains produits alimentaires, comme le fromage, mais pas dans le vin. Il ne fait pas partie de la liste de produits autorisés par l’Organisation internationale de la vigne et du vin, OIV.
Il est aussi utilisé en médecine pour soigner des infections. Il ne serait pas toxique, mais à fortes doses il pourrait provoquer des nausées et des diarrhées. On ne connait toutefois pas ses effets à long terme sur la flore intestinale.
Nous ne savons pas pour le moment si les Fuzion et Santa Julia vendu au Québec et en Ontario contiennent des résidus de ce produit.
Le distributeur des vins de la maison Zuccardi au Québec, M. François Le Brasseur, de l’agence Élixirs, nous dit «nous n’avons jamais obtenu ce type de nouvelle de la part de la SAQ. La SAQ analyse chaque réception des lots et nous n’avons jamais reçu aucune plainte.» Les vins rejetés en Allemagne ne sont pas les mêmes que ceux vendus ici.
Pas de dangers pour la santé?
En Argentine, le président de l’Institut national de la viniviticulture, Guillermo García, tient à préciser «qu’il n’y a aucun risque pour la santé». Il ajoute que son organisme a acheté un appareil plus sophistiqué (500 000 $) pour détecter la présence de ce produit dans les vins de son pays. «L’appareil utilisé en Allemagne est 300 fois plus sensible que le nôtre.» Il demande de plus aux producteurs de faire leurs propres contrôles et il a dit au journaliste du Ciudadano ne pas craindre que cela nuise aux ventes.
Une guerre commerciale?
L’utilisation de la natamycine (natamicina en espagnol est permise en Argentine pour nettoyer les boyaux et les tonneaux (le détergent NAT-3000) dit la réputée oenologue Suzana Balbo. (Los Andes.com). Toutefois, la direction de l’organisme chargé de la promotion des vins de ce pays Wines of Argentina, dont elle est présidente, demande aux producteurs de cesser immédiatement d’utiliser ce produit.
Le produit serait aussi utilisé en Argentine comme stabilisant pour les vins rouges «la natamicina funciona a la perfección como “estabilizador” final de vinos de alta gama».
Dans la presse argentine, on évoque la conspiration, la guerre commerciale, la limitation des importations en Europe qui profiterait à l’Espagne, à la France, à l’Italie et au Chili au détriment de l’Argentine. On parle même de guerre concurrentielle entre laboratoires et vendeurs de produits! On soupçonne ces entreprises argentines d’avoir utilisé un détergent à la natamycine pour tuer des levures. On permet le Velcorin, mais pas la natamycine, dit-on.
Pour tuer les mauvaises odeurs
Le Velcorin® (dicarbonate de diméthyle, DMDC, E242.) est utilisé aux États-Unis pour éliminer les champignons, les levures indésirables. Celles qui donnent des odeurs d’écurie, de fumier, de plastique brûlé, de médicaments; les levures de type brettanomyces.
Contrairement à la natamycine, ce produit de la multinationale Bayer ne laisse pas de trace, puisqu’il s’hydrolyse après avoir tué les microbes. Il est toutefois très dangereux d’utilisation. Il aurait causé la mort de 28 personnes en Argentine, selon Susana Balbo. Il nécessite l’usage d’un appareil particulier. «Seamos en realidad el jamón del sándwich», dans une guerre de gros laboratoires, dit l’oenologue au journal MDZ.
«Pour Wines of Argentine, il est clair que tout ceci n’est qu’une tentative de freiner les exportations argentines», en Europe. C’est ce que conclue Ricardo Montacuto, directeur du journal MDZ de Mendoza, capitale du vin argentin, dans un très long article de 5000 mots : La Guerra del Vino… una historia de presiones, lobby, y competencia feroz (La guerre du vin… une histoire de pressions, de lobby et de compétition féroce).
Exportations
L’Allemagne n’est pas un gros marché d’exportation pour les vins argentins. Ces principaux clients sont les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni, le Brésil et la Hollande.
Les exportations de vin argentin au Canada ont augmenté de 47 % en 2009. (WoA-Exports)
Contrairement au vin chilien, nous ne payons pas le prix fort pour les vins argentins, soit 27,50 $ la caisse pour une moyenne de 28 $. Au Chili, le Canada est celui qui paie le plus cher soit 38 $, alors que les autres acheteurs paient 28 $.
Il y a 155 vins de l’Argentine sur les tablettes de la SAQ actuellement.
En terminant, le natamycine serait permis dans la fabrication du vin en Chine et en Afrique du Sud, mais pour consommation locale seulement!
C’était là une autre tranche de la belle histoire moderne de la fabrication et de la commercialisation de ce magnifique produit qu’est le vin. Chaque jour nous en apprend un peu!
Sources : Natamicinas en vinos; natamycin; natamycine.
Lire aussi La LCBO vérifiera le niveau de natamicine dans le vin, 19 février 2009
et Interdiction de vins argentins et sud-africains en Coré-du-Sud, 17 février 2009