Dans cette étude, M. Frédéric Laurin, professeur d’économie à l’Université de Trois-Rivières, évalue l’impact sur les finances du gouvernement du Québec d’une libéralisation partielle de la distribution des vins et alcools au Québec.
«L’objectif de cette étude est d’estimer les conséquences financières du point de vue du gouvernement du Québec d’une libéralisation partielle de la distribution des vins et alcools au Québec.»
M. Laurin dans son livre précédent avait constaté un «manque de diversité de vins vendus au Québec,» comparé à d’autres pays telle la Belgique.
Le professeur d’économie propose donc qu’on autorise de petites boutiques de vin (cavistes) à importer, distribuer et vendre librement les vins et alcools au Québec. «Ce réseau de cavistes permettrait d’offrir aux consommateurs québécois une plus grande diversité de vins et alcools, à des prix plus abordables, ainsi qu’un service à la clientèle dynamique et personnalisé favorisant l’essor de la qualité et de la gastronomie au Québec.»
Ces cavistes occuperaient le segment des vins de spécialité, les vins de 15 à 60 $. Laissant à la SAQ le vaste marché des vins à fort volume de moins de 15 $. La SAQ en se concentrant sur les gros volumes pourrait ainsi réduire substantiellement ses frais de fonctionnement. La SAQ conserverait aussi le secteur des vins très chers de 60 $ et plus.
Les premiers cavistes seraient les 60 agences qui font actuellement de l’importation privée fortement réglementée et limitée.
Il prévoit que ces cavistes accapareraient entre 5 et 10 % des ventes de la SAQ. Les cavistes se prenant une marge de 20 %, la concurrence entraînera une baisse des prix de l’ordre de 30 % selon lui.
Il donne quelques exemples de prix SAQ et Caviste.
Un Merlot du Pays d’Oc acheté 8,50 $ coûte au consommateur 18 $ après la marge de 33 % de la SAQ. Il serait 14 $ chez un caviste qui se prend un marge de 20 %.
Un Cabernet Sauvignon du Pays d’Oc acheté 3,81 se vend 14,40 $. Il sera 7,65 $ chez un caviste.
Un Brut Sauvignon Mousseux acheté 8,54 $ est détaillé à 23,90 $ après la marge de 50 % de la SAQ; alors qu’il serait 14,91 $ chez un caviste qui prend une marge de profit de 20 %.
Ceci entraînerait une baisse de revenus pour la SAQ, mais qui serait compensé par un accroissement des ventes en volume dû à la baisse des prix. De plus, M. Laurin estime que le dynamisme des cavistes pourrait pousser les consommateurs à acheter des vins de meilleure qualité, donc plus chers, ce qui accroîtra la valeur totale des ventes.
Finalement, il prévoit que la mise sur pied de ces boutiques créerait entre 2100 et 4600 emplois, ce qui amènerait des retombées économiques supplémentaires et donc d’autres revenus pour le gouvernement.
«Une baisse des prix stimulerait les ventes, tant sur les quantités que sur la qualité des vins, accompagnant l’engouement grandissant des Québécois pour la bonne table et les produits fins. Les Québécois qui sont plus limités financièrement auront enfin accès à de bons vins. La croissance des ventes de vin suite à cette baisse de prix devrait soutenir les profits de la SAQ, ainsi que les taxes sur la consommation de vins achetés chez les cavistes.»
Vignoble du Québec
M. Laurin prévoit aussi que les cavistes seront plus intéressés que la SAQ à vendre des vins québécois, devenus moins chers et que cela amènera la création de 359 emplois supplémentaires dans le vignoble québécois.
«Les consommateurs québécois sont sans doute rebutés par les prix élevés des produits québécois vendus à la SAQ. Avec une marge de 145 % imposée par la SAQ sur les prix, les produits québécois deviennent peu concurrentiels par rapport aux prix, à la notoriété et à la qualité des vins importés.»
Il estime que les vins du Québec tripleront leurs ventes pour atteindre ou dépasser les parts de marché des vins du Chili (3,3 %).
Impact sur les finances du gouvernement du Québec
M. Laurin étudie deux scénarios, l’arrivée des cavistes et la baisse des prix entraînement:
A. Une hausse des ventes;
B. Un saut qualitatif.
Dans le premier cas, les bénéfices de la SAQ chutent de 64 % passant de 867 millions à 305 millions. Compensé en partie par les retombées économiques des cavistes évalués à 142 millions.
Dans le meilleur des scénarios, le B, «le consommateur profite de la baisse de prix pour monter en qualité de produit», après une baisse des bénéfices à 590 millions dans la première année, ceux-ci augmente à 731 millions après 5 ans, mais compensé par les 252 millions d’effets sur le PIB de l’action des cavistes sur l’économie du Québec.
«Au total, tant dans le scénario A que le scénario B, le Gouvernement du Québec accuse une baisse de recettes dans les toutes premières années d’une libéralisation partielle, mais par la suite, les recettes augmentent rapidement et viennent en moitié (scénario A) ou presque totalement (scénario B) compenser les pertes de départ. Ceci est dû en grande partie au développement de la production québécoise de vins et alcools ainsi que du développement commercial des cavistes qui apportent des retombées économiques importantes pour le Québec.»
M. Laurin conclut son étude de 56 pages en disant que la venue des cavistes permettrait «enfin aux Québécois d’apprécier les plaisirs liés à la dégustation de vin dans toute sa diversité.»
Impact d’une libéralisation partielle de la distribution des vins et alcools au Québec sur les finances du Gouvernement du Québec, Frédéric Laurin. Mars 2012 (Document PDF de 56 pages).