Je m’en vais à Montréal pour déguster des vins du Beaujolais. Un de mes amis me dit incrédule et étonné : «tu fais des heures de route pour déguster du beaujolais!»
Eh Oui! Le beaujolais a encore mauvaise réputation dans une bonne partie de la population. Cet ami ajoute qu’il y a une vingtaine d’années, il mettait du beaujolais en cave, des crus, avec un certain succès, mais qu’il a cessé par après. «Est-ce mes goûts qui ont changé, ou est-ce que la qualité de ces vins a baissé?» demande-t-il.
Un producteur me dit que la situation n’était pas rose dans sa région depuis quelques années. Des producteurs se sont remis en question et ont travaillé très fort pour améliorer la qualité. Les consommateurs sont de plus en plus exigeants et infidèles surtout.
Je constate en effet que le Beaujolais viticole a fait de grands progrès ces dernières années. On n’a moins souvent ces saveurs fermentaires et de bonbons acidulés pour retrouver maintenant des fruités nets vraiment plus plaisants dans ces vins faits du cépage gamay. Je vous ai déjà parlé des vins de Château de Pierreux et de Monternot, tous deux sous le chapeau de la maison Mommessin. De très beaux vins, des régals.
Les méthodes de travail, à la vigne comme en cave, ont changé de manière drastique (…) (Les producteurs) expriment dans leurs vins, les innombrables nuances de ce terroir. (…) Le niveau de qualité proposé par les vins du Beaujolais est digne des exigences des marchés de consommation dits « matures » (…) 2800 producteurs en Beaujolais, chacun avec son style.»
Dominique Capart, président de l’Inter Beaujolais (Les Rendez-vous Beaujolais Montréal 2010)
Le Canada (grâce au Québec) est un très bon client du Beaujolais : le quatrième client en volume après le Japon, les États-Unis et l’Angleterre.
Donc, 35 producteurs, vinificateurs et négociants du Beaujolais sont venus à Montréal présenter leurs vins aux sommeliers, restaurateurs, conseillers de la SAQ et journalistes.
C’était la première fois que je goûtais dans une seule occasion autant de vins de cette région. Je dois dire que j’ai été fortement impressionné par la qualité d’ensemble et surtout par certains vins. Je n’ai pas tout goûté, mais en trois heures et demie, j’ai eu un bel aperçu de ce qui se fait dans cette région. Et ça me plaît.
Les Crus et les autres
Première constatation : il y a une différence énorme entre les Crus du Beaujolais et les Beaujolais Villages et les Beaujolais tout court. Les premiers sont plusieurs crans au dessus. Mis à part quelques rares exceptions, j’ai trouvé peu d’intérêts à déguster les non-crus. J’en ai tiré la conclusion qu’il valait mieux payer quelques dollars de plus afin d’obtenir des vins beaucoup plus plaisants.
En général, les prix des Beaujolais, même des crus, ne sont pas très élevés. Plusieurs producteurs nous offrent de très bons vins à 18 et 19 $. D’autres plus rares montent jusqu’à 35 $ et certains même jusqu’à 50 $.
Avant d’aller plus loin : qu’est-ce qu’un cru du Beaujolais? C’est le haut de la crème de cette région. Il sont au nombre de 10 : Moulin à Vent, Morgon, Chénas, Juliénas, Côte de Brouilly, Fleurie, Saint-Amour, Régnié, Brouilly et Chiroubles. Ils sont présentés ici sur l’image de droite en fonction de leur position géographique du nord au sud.
Le Beaujolais est situé au sud de la Bourgogne, au sud de la ville de Mâcon, au nord de Lyon, sur la rive ouest de La Saône.
Un millésime 2009 superbe
Quelques producteurs ont eu l’idée géniale d’apporter à Montréal des vins du millésime 2009. Des vins totalement différents des millésimes précédents. Plus foncés, plus gras, plus joufflus, plus d’extraction, vraiment très bons.
Je pense ici à ce Juliénas 2009 (ne prononcez pas le s, on est au nord de Lyon me rappelle un vigneron), un Juliénas de la maison Coquard, gourmand et bien long. De la même maison, le Fleurie 2009, plus acide, plus serré. Le Saint-Amour 2009, parfumé et vivace. De son côté le Chénas 2007 est tout en finesse et prêt à boire, et finalement le Morgon 2006 est vineux et sérieux. Tous ces vins à des prix raisonnables, à moins de 20 $. De très beaux vins amples, fruités et charnus. J’allais oublier son très beau rosé Clochemerle 2009, d’une grande fraîcheur.
Levures naturelles et pas de vendanges mécaniques
Il semble bien qu’un bon nombre de producteurs de la région sont retournés à l’utilisation des levures naturelles (Certains n’auraient jamais cessé, me dit-on). Les levures naturelles donnent d1es vins plus frais, plus gouteux et plus originaux. Elles sont le miroir du terroir. Ajoutons aussi que dans cette région il est interdit de faire des vendanges mécaniques. Les raisins arrivent ainsi moins abimés à la cave, ce qui fait qu’on peut réduire l’usage des sulfites. Plusieurs producteurs sont très fiers d’ailleurs de dire qu’ils utilisent peu de soufre.
Certains vins qui contiennent très peu de soufre ne sont disponibles ici qu’en importation privée. En effet, ils ne doivent pas séjourner sur les chaudes tablettes des succursales de la SAQ. Car ces vins faibles en soufre (sulfites) doivent être entreposés à des températures inférieures à 15 °C.
Le champion du beaujolais blanc
Oui, c’est rare le beaujolais blanc, moins de 2 % du total de la production de la région. Il y a un producteur qui en fait une grande quantité. C’est Jean-Paul Brun, qui y consacre 30 % de sa production. Sur son domaine des Terres Dorées, en plus du gamay, il y a du pinot noir, de la roussanne et du chardonnay. D’autres plantent du viognier. Son Terres Dorées Blancs fût de chêne 2008 (23 $) est superbe, gras, ample et ferme. Son chardonnay Classique 2009 est encore meilleur, plus délicat, plus élégant et somptueux. Ses rouges sont magnifiques : Morgon 2009 serré et opulent. Il a très bien réussi ses Moulin à Vent et Fleurie 2008, malgré le millésime difficile, nous dit-on.
D’autres producteurs à signaler :
Christophe Pacalet avec son très beau Côte de Brouilly 2008. (Agence Rézin)
Marcel et Mathieu Lapierre pour son Morgon non filtré 2008. (Rézin)
Jean Foillard avec un Morgon Corcelette 2008 de grande qualité (37 $) (Rézin)
Château de la Chaize, pour ses trois Brouilly, son Vieille Vigne 2006, sérieux (28 $); sa Réserve de la Marquise 2005 étonnant avec un boisé vin (34 $). (Agence Mosaiq)
Château de Pizay, un Réginé 2008 vraiment bien plaisant (17 $), Morgon 2008, tannique et plein (18 $), et la Cuvée biologique 2007 à la finale suave (500 ml 21 $) (Agence Mosaiq)
Karim Vionnet fait un Vin de Kav Chiroubles 2008. tellement original qu’on ne dirait pas du beaujolais (27 $) (Agence Oenopole)
Domaine du Vissoux avec ses très beaux vins, frais, épicés, fruités et d’un bel équilibre. Un vignoble de 35 ha. À notez en particulier son Fleurie Poncié 2008 et le Moulin à Vent Les Trois Roches 2007. (Agence Le Maître de chai)
Loron et Fils fait de beaux vins à bon prix. J’ai particulièrement aimé son Morgon (17 $) et son Juliénas 2009. (Agence Sélect vins)
Visez les crus
Donc, en résumé, il faut viser les crus. Pour quelques dollars de plus, il sont vraiment supérieurs aux autres. Il faut bien surveiller l’arrivée des 2009, vraiment au-dessus de tout.
Surveillez aussi la publication du magazine Cellier de septembre. On y parlera du Beaujolais et de nouveaux vins de cette région seront sur les tablettes.
Pour en savoir plus sur ces vins, ces producteurs et sur le Beaujolais, consultez le site beaujolais-quebec.com très bien documenté.