J’ai gouté de nouveau dernièrement un très bon vin que je qualifierai de meilleur vin de Bougueil que j’ai bu: le Mi-Pente Bourgueil 2005 du Domaine de La Butte.
Dégusté avec des amis grands amateurs de vins, nous avons tous été surpris par la qualité de ce vin. C’était la première fois que nous étions impressionnés et charmés par un vin de cette appellation Bourgueil en Loire. J’ai même écrit par après «c’est sûrement et de loin le meilleur bourgueil vendu au Québec», dans un article sur la typicité des vins. Un collègue le qualifie de meilleur vin rouge de la Loire!
Un autre ami en avait en cave et nous en a donc faire regoûter la semaine dernière. Une belle surprise encore.
Il n’en reste plus sur les tablettes. Alors j’écris au producteur Jacky Blot lui demandant quand il va nous envoyer son prochain millésime. Voici ce qu’il me répond:
Nous sommes désolés mais pour l’instant nous ne sommes pas disponibles au Québec. Nous rencontrons sans cesse de très grosses difficultés avec la SAQ qui ne trouve jamais nos vins convenables à l’analyse: pas assez de sulfites, trop de dépôts, etc etc…»
M. Blot a aussi un autre beau vin au Québec le Domaine de la Taille aux Loups.
Grosses difficultés avec la SAQ!
Je demande alors la version de la SAQ. Pas de réponse!
Problèmes avec les sulfites! Mais est-ce que la SAQ exige une dose minimale de sulfites dans le vin. Je pose la question à la SAQ. On me répond en me faisant suivre un article du magazine Cellier dans lequel Mme Guylaine Trudeau, chimiste et directrice de la gestion de la qualité à la SAQ dit qu’il n’y a pas de dose minimale. Elle ajoute cependant que «chaque produit est néanmoins analysé afin de s’assurer qu’il est suffisamment protégé pour assurer une bonne période de commercialisation».
Dans cet article, l’auteur Patrick Désy écrit ceci: «Difficile, effectivement, de rester indifférent lorsqu’on déguste un vin contenant un minimum de soufre ajouté, tant les arômes de fruit frais et d’épices peuvent être exubérants. Même plaisir en bouche, avec un fruité souvent très pur et une texture vibrante unique.»
Donc, des vins qui sont souvent meilleurs. Mais il y a un hic. Ces vins peu soufrés, donc moins bourrés de préservatifs, doivent être conservés dans de bonnes conditions. Qu’elles sont ces conditions? Les mêmes que celles de tous produits alimentaires sains: dans des locaux pas trop chauds.
Dans les bonnes épiceries, les fruits et légumes ne sont pas exposés à des températures trop chaudes. Chez les bons cavistes en France, aux États-Unis, la température est plus fraîche.
Est-ce que la SAQ n’est pas en mesure de conserver les vins frais dans de bonnes conditions «pour assurer une bonne période de commercialisation»?
Des dépôts? Est-ce que le consommateur québécois n’est pas habitué maintenant à voir des dépôts dans les vins de qualité?
Au bas de la pente
Ici nous ne sommes plus à mi-pente, plutôt au bas de la pente ou tout près d’y tomber?
Les bons producteurs cherchent de plus en plus à faire des vins les plus sains que possible et à limiter les filtrations, les clarifications et la quantité de sulfites ajouté. Ils veulent ainsi préserver le plus de saveurs naturelles du vin. Est-ce à dire que ces vins nous seront de moins en moins accessibles?
Monsieur Blot nous dit qu’il cherche maintenant du côté de l’importation privée. «Nous sommes contrariés car nous avons régulièrement des demandes d’amateurs du Québec tant pour les blancs de la Taille aux Loups que pour les rouges de la Butte.»
Est-ce que d’un côté de la pente nous aurons les vins moins sulfités en importation privée et de l’autre les vins bourrés de préservatif, bien filtrés et stabilisés dans les magasins publics?
Est-ce que la plupart des bons vins peu sulfités se retrouveront au privé, accessibles surtout aux restaurateurs, laissant sur les rayons de la SAQ les vins les plus sulfités.
Dans son Guide des meilleurs vins de France, les auteurs de la Revue du Vin de France écrivent «le Mi-Pente est la plus grande cuvée de terroir créée à Bourgueil depuis longtemps.»
Soufrez, nous sommes à mi-pente!
Clarifiez, allons-nous remonter ou descendre?