Il y a des critiques de cinéma, des critiques de restaurant, des critiques de livre, d’opéra, de théâtre… mais est-ce qu’il y a des critiques vin ?
Ils sont très rares ceux qui osent critiquer les vins.
Et pour cause. Il se font critiquer lorsqu’ils osent.
C’est ce qui vient d’arriver à un excellent journaliste du vin, David Cobbold. Il écrit dans plusieurs médias français. Cette semaine il a commenté une de ses dégustations sur le très bon blogue Les cinq du vin. Une dégustation de vin de la maison Muré en Alsace. Il a jugé les vins pas très bons. «Herbacé, austère, peu de plaisir, amertume, métallique, dur, peu agréable, bouchonné», sont parmi les mots qu’il a employés pour décrire six vins de cette maison. Un seul vin a semblé bon.
Le critique met des gants blancs! «Voilà, j’ai essayé d’être honnête envers mes sensations en dégustant les vins, à la bonne température et dans de bons verres, faut-il le préciser. Cela ne me fait pas plaisir de dire du mal de vins d’un producteur, à fortiori un producteur dont j’ai très souvent loué les qualités. Mais la déception fait partie de notre métier, et il faut toujours l’assumer», at-il écrit en conclusion.
II devait s’y attendre — car il est en France — les commentaires ont fusé: «Je me demande s’il est heureux de rédiger un article comme celui-ci»; «cela va à l’encontre du système établi»; «Boire une bouteille de vin qui se trouve sur une table sans avoir piétiner/marcher dans la vigne et sans avoir rencontrer les vignerons!… reste un jugement de peu de valeur»; «Vous faites ici littéralement un procès immonde à ce producteur et votre argumentaire se base sur une dégustation réalisée dans une période où les habitués du domaine savent pertinemment que de nombreux vins ne peuvent pas s’exprimer correctement».
Comme on dit les wine lovers sont nombreux, mais les wine critics sont rares.
Vous lisez louanges après louages sur les vins; et tout d’un coup arrive un gars qui dit que des vins ne sont pas bien bons. Ça frappe!
Pourtant, dans les critiques de film il y en a de toutes les sortes, des bons films, des très bons et des navets. Pourquoi dans le monde du vin tout doit être toujours bon?
Dans le monde du cinéma, le critique est loin du cinéaste. Pendant que dans le monde du vin, le chroniqueur vin (je n’ose employé le mot critique) est proche du vigneron et de ses agents. Il craint de ne plus être invité, de ne plus recevoir d’échantillon. C’est probablement la promiscuité qui rend la critique presque impossible dans le bucolique monde du vin. Il y a peut-être aussi autre chose, cherchons, nous y reviendrons.
C’est à lire La déception fait partie de notre métier, malheureusement.
Lire ainsi que les commentaires.
Sur le même sujet :
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- Toutes les critiques sont positives
- Métier critique, livre de Catherine Voyer-Léger, Éditions Septentrion.